Crédit: SWEDD Bénin

L'éducation à la santé sexuelle, un enjeu à reconsidérer pour la réussite des filles

Depuis maintenant plusieurs années, les questions relatives à la réussite des filles s’inscrivent de plus en plus au centre des préoccupations. Parents, gouvernements, organisations non gouvernementales et autres structures connexes s’investissent davantage pour ces dernières. Des programmes étatiques ou paraétatiques en faveur des adolescents et des filles en particulier ne manquent pas. Longtemps restée tabou, l’éducation à la sexualité est aujourd’hui l’une des priorités des différents acteurs. Mais au Bénin, l’impact réel des actions dans ce domaine reste à réévaluer. Où en est-on, et comment améliorer la situation ? 

Le gouvernement en première ligne de front 

Au Bénin une nouvelle dynamique se profile à l’horizon quant à l’accomplissement du potentiel des filles. Le gouvernement semble comprendre l’enjeu que représente l’éducation sexuelle des filles. C’est du moins la lecture qui se dégage du message de la ministre des affaires sociales à l’occasion de la Journée Internationale des Filles célébré le 11 octobre. La ministre Véronique Tognifodé a dressé un tableau qui suscite l’espoir pour les filles, mères de demain.

Au titre des actions phares cette année en faveur des filles en matière d’éducation sexuelle, la campagne AGBAZATCHE. Cette initiative du gouvernement béninois à travers les projets sectoriels du ministère des affaires sociales a principalement consisté à la sensibilisation des jeunes filles des collèges et lycées sur les comportements à risque, la santé sexuelle et reproductive. Ainsi depuis mai 2021, la ministre et son équipe ont entrepris une tournée sur l’ensemble du territoire national pour échanger avec les filles dans plusieurs collèges d’enseignement général sur ces questions relatives à l’éducation sexuelle. Ces rendez-vous ont été l’occasion pour l’autorité d’entretenir les filles sur les risques qu’il y a à pratiquer le sexe en milieu scolaire.

Plus encore, le Bénin bénéficie du Projet régional sur l’autonomisation des femmes et le dividende démographique au Sahel (SWEDD) qui s’emploie à réaliser les droits et le plein potentiel de plus de 3 millions de jeunes filles et garçons d’ici 2024. 

Avec de telles actions qui, espérons-le, garderont une constance, on peut estimer sans risque de se tromper que le gouvernement béninois prend le chemin de la promotion des droits des filles, notamment leur droit à l’éducation sexuelle. 

L’accompagnement des parents reste à susciter 

C’est un secret de polichinelle, en Afrique et particulièrement au Bénin, les échanges entre parents et enfants sur la sexualité sont tabous. Pourtant, les parents et les familles élargies ont l’impact le plus direct et le plus durable sur l’apprentissage des enfants et jouent un rôle clé dans le soutien de leur éducation. En effet, les parents restent généralement des modèles pour les enfants. Leur attitude vis-à-vis de l’éducation peut à la fois inspirer les enfants et les responsabiliser au cours de leur propre parcours éducatif. 

Le partenariat mondial pour l’éducation estime que les parents devraient être activement impliqués dans l’éducation de leurs enfants et participés aux efforts visant à garantir que tous les enfants reçoivent une éducation de qualité, et par ricochet une éducation à la sexualité. De nombreuses études ont montré le déficit de connaissances des jeunes en matière de prévention des risques liés à la sexualité. La diffusion d’une information précise et complète auprès des adolescents et surtout des jeunes filles sur leur santé sexuelle et reproductive par les parents s’avère donc un impératif pour la réussite de la lutte contre les IST/VIH/SIDA et les grossesses non désirées. L’accompagnement des parents est plus capital pour encourager un comportement responsable et retarder le début de l’activité sexuelle chez les jeunes filles. Le manque d’information et de dialogue parents-enfants sur la sexualité peut avoir de lourdes conséquences pour les jeunes filles.    

Face aux limites des programmes étatiques et paraétatiques, il est donc indispensable que les parents démystifient les questions liées à la sexualité. En parler avec les enfants, notamment les filles ne serait que bénéfique à toute la nation. 

Promouvoir l’éducation des filles au-delà de l’éducation sexuelle

La volonté de l’Etat de changer la donne ne fait plus de doute aujourd’hui. Au nombre des actions entrant dans le cadre général de l’accès des filles à l’éducation au Bénin, on recense : 

– l’exonération des frais de scolarité à toutes les filles des cours primaires et secondaires et de quelques filières des lycées ;

– la distribution systématique de kits scolaires à toutes les filles orphelines ou vulnérables à partir de la classe de CM1 jusqu’en terminale ;

– l’attribution de bourses d’étude aux meilleures filles des filières techniques des lycées.

Par ailleurs, pour le développement et l’épanouissement des filles, le gouvernement béninois a développé plusieurs programmes tels que le Programme Cash Plus Care. Il vise à éradiquer le mariage des enfants et des adolescentes à travers l’élimination de la pauvreté en leur accordant des facilités pour se maintenir dans le système éducatif. Ce programme a impacté 26 000 filles des ménages pauvres identifiés dans plusieurs communes du Bénin.

Renforcer la protection des filles et leur assurer un environnement sécurisé, sont aussi au cœur de la politique du gouvernement en faveur de celles-ci. L’Assemblée nationale a récemment voté un projet de loi portant des dispositions spéciales de répression des infractions commises à raison du sexe des personnes et de protection de la femme en République du Bénin. Le texte devrait faire l’objet d’une étude en procédure d’urgence.

L’investissement dans les filles n’est pas que l’apanage de l’Etat béninois. Avec le soutien de la Banque mondiale, le sous-projet « maintien des enfants, des adolescentes et des jeunes filles à l’école » du Projet régional d’Autonomisation des Femmes et Dividende Démographique au Sahel (SWEDD-Bénin) est en mise en œuvre dans le pays depuis 2020. Pour opérationnaliser ce sous-projet, 23.000 kits scolaires ont été distribués aux filles des établissements d’enseignements primaires et secondaires généraux du Bénin au titre de l’année académique 2020-2021. 

Toujours au profit des filles, une campagne de communication dénommée Stronger Together dont la thématique centrale est : « Éducation et leadership féminin » est lancé depuis juillet 2021 par le gouvernement sous la supervision de SWEDD-Bénin. Les objectifs de cette campagne sont multiples et se déclinent en plusieurs points à savoir :

-la scolarisation et le maintien des filles à l’école jusqu’à au moins à la fin du cycle secondaire par les parents ;

-l’accès des femmes et des filles à la formation, à l’emploi, aux opportunités économiques et aux instances de prise de décision ;

-la promotion de l’utilisation par les femmes et les adolescentes des services et produits de santé reproductive et de planification familiale, ainsi que de l’hygiène menstruelle y compris les méthodes contraceptives modernes ;

-l’implication des femmes et des filles dans la lutte contre les violences basées sur le genre et les pratiques néfastes (excision/mutilation génitale féminine).

Toutefois, au vu de tout ce qui précède, il urge de sonner la mobilisation tant qu’il reste à faire. Tous les acteurs doivent jouer leur partition dans la sensibilisation pour une prise de conscience des filles quant à la sexualité et leur autonomisation. Cela participe à coup sûr à garantir un avenir meilleur à cette couche très importante de notre nation, bien même si d’autres paramètres doivent y concourir. La réussite des filles doit demeurer une préoccupation commune dans un monde où la population féminine estimée à plus de la moitié de la démographie du pays est en perpétuelle évolution. 

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Auteur·e

letamiseur

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